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Biotechnologie, Agronomie, Société et Environnement/Biotechnology, Agronomy, Society and Environment

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Mamoudou Traoré, François Lompo, Bouma Thio, Badiori Ouattara, Korodjouma Ouattara & Michel Sedogo

Influence de la rotation culturale, de la fertilisation et du labour sur les populations de nématodes phytoparasites du sorgho (Sorghum bicolor (L.) Moench)

(volume 16 (2012) — numéro 1)
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Reçu le 12 septembre 2009, accepté le 6 décembre 2011

Résumé

Les nématodes du sol de trois essais de longue durée (1960, 1980 et 1990) représentatifs de la production du sorgho (Sorghum bicolor (L.) Moench) sous différentes pratiques agricoles (rotation, fertilisation et labour), au centre-ouest du Burkina Faso, ont été prospectés au lendemain de la récolte pendant la saison agricole 2007/2008. L'objectif était d'identifier ces nématodes et d'étudier l'influence des pratiques agricoles sur cette nématofaune. Les nématodes ont été extraits selon la méthode de l'élutriateur de Seinhorst. Les nématodes phytoparasites recensés sont Pratylenchus brachyurus, Tylenchorhynchus martini, Helicotylenchus multicinctus, Scutellonema cavenessi, Criconemoïdes curvatum, Telotylenchus indicus et Xiphinema sp. Les trois premières espèces représentent environ 98 % du nombre d'individus recensés. Sur le premier site, les traitements associant la fumure minérale et le recyclage de la paille du sorgho ont été favorables pour le contrôle des nématodes, au contraire des traitements associant le fumier. Pour les rotations, la monoculture de sorgho a été plus infestée en nématodes par rapport aux rotations sorgho – niébé et sorgho – coton. Sur le second site, l'apport d'azote a entrainé une hausse de l'infestation par les deux principaux nématodes, en comparaison avec les traitements sans azote, exception faite du traitement avec incorporation du compost anaérobie. Sur le troisième site, le labour profond a été défavorable aux principaux nématodes du sorgho par rapport au labour superficiel. La nématofaune des jachères a été plus diversifiée que celle des sites cultivés et le principal nématode lié au sorgho, P. brachyurus, a fortement régressé dans les jachères.

Mots-clés : Jachère, nématode des plantes, rotation culturale, lutte culturale, labour

Abstract

Influence of crop rotation, fertilization and tillage on populations of plant parasitic nematodes of sorghum (Sorghum bicolor (L.) Moench). The soil nematodes of three long-term trials (1960, 1980 and 1990) representing the production of sorghum (Sorghum bicolor (L.) Moench) under different agricultural practices (rotation, tillage and fertilization) in the Center West of Burkina Faso, have been explored in the wake of the harvest during the agricultural season 2007/2008. The objective was to identify these nematodes and to study the influence of agricultural practices on this nematofauna. Nematodes were extracted by the method of Seinhorst elutriator. Plant-parasitic nematodes identified are Pratylenchus brachyurus, Tylenchorhynchus martini, Helicotylenchus multicinctus, Scutellonema Caveness, Criconemoides curvatum, Telotylenchus indicus and Xiphinema sp. The first three species represent approximately 98% of individuals surveyed. On the first site, the treatments involving mineral fertilizer and recycling of sorghum straw were favorable for the control of nematodes instead of treatments involving manure. As for rotations, monoculture of sorghum was more infested by nematodes than the rotations sorghum – cowpea and sorghum – cotton. On the second site, the nitrogen has increased of infestation by the two major nematodes in comparison to treatments without nitrogen, with the exception of treatment with anaerobic compost incorporation. On the third site, deep plowing has been unfavorable to the main nematode sorghum compared to shallow tillage. The nematofauna in fallow was more diversified than in cultivated sites and P. brachyurus, the main nematode related to sorghum has fallen sharply in fallow.

Keywords : rotation, Sorghum bicolor, Sorghum bicolor, fertilisation, fertilization, Burkina Faso, Fallow, Burkina Faso, tillage, plant nematodes

1. Introduction

1Sorghum bicolor (L.) Moench est une céréale importante, particulièrement pour les zones chaudes à pluviométrie réduite de la zone tropicale. En termes de production dans le monde entier, le sorgho est la cinquième céréale au monde. Au Burkina Faso, le sorgho est la céréale la plus répandue, sa culture y est pratiquée partout en saison des pluies, là où les précipitations sont supérieures à 400-500 mm. La superficie consacrée à la culture du sorgho est passée de 1 016 275 ha en 2000 à 1 619 590 ha en 2007 (FAO, 2009). Malgré cette hausse, le Burkina Faso, à l'instar de la plupart des pays du Sahel, est confronté depuis de nombreuses années à une grave crise alimentaire liée aux effets des phases de sècheresse mais aussi à la dégradation de la qualité des terres cultivables (Sedogo, 1993). De nos jours encore, les aléas climatiques, l'inadéquation des pratiques culturales, la pauvreté des sols et la faible fertilisation sont soulignées comme les contraintes majeures à la production agricole au Burkina Faso (Bado, 2002 ; Bonzi, 2002 ; Hien, 2004).

2Les ravageurs et les maladies des céréales ont été reconnus depuis longtemps comme des contraintes importantes à la production de céréales dans le monde entier et ont été l'objet de recherches approfondies. Parmi les facteurs biotiques, les nématodes pourraient constituer l'un des principaux organismes impliqués dans ledit phénomène. Cependant, de tous les dangers potentiels qui menacent les cultures, les nématodes sont souvent les moins connus et ont été en grande partie exclus de l'attention de la recherche (Reversat, 1988). Les données sur l'importance des nématodes, la composition et la densité des populations, leur caractère pathogène, en particulier la survenue des dommages causés par certaines espèces ou groupes d'espèces sont peu nombreuses (Talwana et al., 2008). Pourtant, les nématodes phytoparasites ont été signalés comme de graves entraves aux productions céréalières et maraichères dans différentes régions du monde (Luc, 1960 ; Mallamaire, 1965 ; Bachelier, 1978 ; Reversat, 1988 ; Bois et al., 2000 ; Bélair, 2005 ; Talwana et al., 2008). Ces déprédateurs affectent les rendements des cultures tropicales des pays du Tiers Monde, d'où leur importance économique (Prot, 1985 ; NDiaye, 1994). En Afrique subsaharienne, la presque totalité des cultures vivrières et de rente enregistre des baisses de rendements du fait des nématodes qui les parasitent (Cadet, 1998 ; Bois et al., 2000). Ces baisses de rendement dues aux nématodes peuvent atteindre 25 à 40 % en l'absence de traitement nématicide (Prot, 1985). Pour le sorgho, bien qu'un certain nombre de nématodes qui lui sont associés ait été inventorié, peu d'informations sont disponibles sur les espèces inféodées à cette culture. Mais l'augmentation des rendements après le traitement chimique du sol où des densités élevées de population de ces nématodes inféodés ont été enregistrées, fournit des preuves indirectes de dommages économiques considérables (Prot, 1985 ; McDonald et al., 2005).

3Notre hypothèse est que les pratiques culturales telles que les rotations, les fertilisations et le labour peuvent permettre de réduire l'infestation du sorgho en nématodes.

4L'objectif global de cette étude est d'identifier les nématodes phytoparasites du sol de la culture du sorgho sous différentes pratiques culturales (rotation, fertilisation et labour) et de montrer l'influence de ces pratiques agricoles sur les populations de nématodes. De manière spécifique, il s'agissait de déterminer la composition et l'importance des espèces de nématodes sous ces différentes pratiques culturales. Cette étude est une contribution à l'élaboration de modes de gestion des terres culturales qui réduisent l'impact des nématodes sur la culture du sorgho.

2. Matériel et méthodes

2.1. Description du site

5Cette étude s'est déroulée en octobre 2008 sur trois essais agricoles situés dans la Station de Recherches environnementales et agricoles de Saria (12°16' N et 2°9' W) au centre-ouest du Burkina Faso. La station de Saria est soumise à un climat de type soudanien caractérisé par l'existence de deux saisons très marquées : une longue saison sèche (octobre à mai) et une courte saison de pluie (juin à octobre). L'altitude de Saria est de 300 m, les précipitations moyennes annuelles sont de 800 mm et la couche arable est un terreau sablonneux (Hien, 2004). Ces essais sont nommés respectivement Saria I, Saria II et Saria III.

6Saria I ou Essai Entretien de Fertilité (EEF). C'est un dispositif qui a été mis en place en 1960 pour étudier la fertilité d'un sol ferrugineux tropical sous l'influence de différentes pratiques culturales comprenant des fumures minérales et organiques. Trois systèmes de culture sont mis en œuvre : monoculture de sorgho, rotation sorgho – coton, rotation sorgho – niébé. Le dispositif est un split-plot en blocs complets avec six répétitions. La dimension du site est de 161,2 m 60 m = 9 672 m². Les parcelles mesurent 10 m de long sur une largeur de 8,40 m. Une allée de 2 m sépare deux blocs voisins. Six traitements identiques sont appliqués à chacun des trois systèmes :

7– T1 : témoin absolu

8– T2 : fumure minérale faible de formule (37N-23P-14K-6S-1B) + recyclage des pailles de sorgho tous les deux ans. La formule chimique de la fumure minérale désigne le nombre de kg respectivement d'azote (N), de phosphore (P), de potassium (K), de soufre (S) et de bore (B) pour 100 kg d'engrais. La dose appliquée est de 100 kg.ha-1

9– T3 : fumure minérale faible + fumier (5 t MS.ha-1 tous les 2 ans) + exportation des pailles de sorgho

10– T4 : fumure minérale faible de formule (37N-23P-14K-6S-1B) sans fumier

11– T5 : fumure minérale forte (60N-23P-44K-6S-1B) + fumier + exportation des pailles de sorgho

12– T6 : fumure minérale forte (60N-23P-44K-6S-1B) sans fumier.

13Le recyclage de la paille sur une parcelle est effectué à partir des pailles produites sur la même parcelle l'année précédente. La paille est hachée avant d'être apportée sur la parcelle. Le fumier est un mélange de paille de sorgho et de déjections animales produites à l'étable, stocké dans des fosses où il évolue pendant 6 mois environ. Le fumier et la paille sont enfouis par le labour ainsi que les engrais minéraux lors du semis. Les engrais apportés à la montaison et à la floraison sont enfouis par le sarclo-binage réalisé juste après leur épandage. Les engrais apportés au semis sont le chlorure de sodium (KCl) et le NPK à raison respectivement de 50 et 100 kg.ha-1. L'apport de l'urée est fractionné, 50 % à la montaison et 50 % à la floraison.

14Saria II ou Essai Étude Comparative (EEC). Ce dispositif a été implanté en 1980 pour comparer les effets de diverses matières organiques exogènes (fumier, paille de sorgho, compost aérobie, compost anaérobie), en présence ou non de fumure azotée (sous forme d'urée) sur les rendements du sorgho et la fertilité du sol. Les parcelles mesurent 5,20 m de longueur sur 4 m de largeur. Une allée de 2 m sépare deux blocs voisins. La dimension du site est de 45,2 m x 44 m = 1988,8 m². C'est un dispositif en factoriel 5 x 2 avec six répétitions. Les dix traitements pratiqués à ce système de monoculture de sorgho sont :

15– T1 : témoin sans azote : « T (-N) »

16– T2 : témoin + azote : « T (+N) »

17– T3 : compost anaérobie (10 t.ha-1.an-1) sans azote : « Can (-N) »

18– T4 : compost anaérobie (10 t.ha-1.an-1) + azote : « Can (+N) »

19– T5 : compost aérobie (10 t.ha-1.an-1) sans azote : « Cae (-N) »

20– T6 : compost (10 t.ha-1.an-1) aérobie + azote : « Cae (+N) » 

21– T7 : fumier (10 t.ha-1.an-1) sans azote : « F (-N) » 

22– T8 : fumier (10 t MS.ha-1.an-1) + azote : « F (+N) » 

23– T9 : paille (10 t.ha-1.an-1) sans azote : « P (-N) » 

24– T10 : paille (10 t.ha-1.an-1) + azote : « P (+N) ».

25L'apport de l'azote est de 60 kg.ha-1.an-1 sous forme d'urée (46 % de N) en deux fractions : une moitié au semis et une autre à la montaison (30 jours après semis). Le compost aérobie est obtenu par le compostage pendant 3 mois de paille de sorgho et de déjections de bœufs dans des fosses. Il est préparé dans des compostières de 1,5 m3. Ce que l'on nomme compost anaérobie dans cette expérimentation est en fait un sous-produit de méthanisation issu de la fermentation dans des cuves de biogaz anaérobie de la station ; la paille de sorgho et les déjections animales sont fermentées en milieu anaérobie pendant 5 à 6 mois.

26Saria III ou Essai Étude Physique (EEP). Cet essai a été implanté en 1990 pour étudier les effets de la mise en culture d'une jachère de longue durée sur l'évolution des propriétés physiques, chimiques et biologiques du sol sous culture de sorgho cultivé en monoculture. Il compare les effets de deux types de préparation du sol (grattage du sol manuel à la daba et labour à plat aux bœufs) associés ou non à l'apport de 10 t MS.ha-1.an-1 de fumier. La daba est une houe à manche court, outil aratoire traditionnel du paysan sahélien. Le labour à bœufs est effectué avec une charrue tractée par une paire de bœufs. Le labour est effectué à 15-20 cm de profondeur et le grattage à 3-5 cm. La fumure minérale est apportée chaque année sous forme de NPK (14-23-14) et d'urée (46 % de N) aux doses respectives de 100 et 50 kg.ha-1. Les parcelles mesurent 8 m de longueur et 7 m de largeur. Une allée de 2 m sépare deux blocs voisins. Les dimensions du site sont de 43 m x 42 m = 1 806 m². C'est un dispositif en factoriel 2 x 2 avec 3 répétitions (3 blocs).

27Les traitements appliqués sont :

28– T1 labour aux bœufs sans fumier (Lb - F) 

29– T2 labour aux bœufs + fumier (Lb + F) 

30– T3 labour manuel sans fumier (Lm -F) 

31– T4 labour manuel + fumier (Lm + F).

2.2. Échantillonnage des nématodes

32Les nématodes ont été échantillonnés selon la méthode des cultures en lignes de Celetti (Celetti, 2006). L'échantillon d'une parcelle est constitué par des prélèvements de sols effectués à 20 cm de profondeur en plusieurs endroits à l'aide d'une truelle, en fonction de la taille de la parcelle, de manière à couvrir toute la parcelle (pour la taille de nos parcelles, le prélèvement a été fait en cinq points). Un échantillon pèse en moyenne 3 kg. Le prélèvement des échantillons a été effectué au lendemain de la récolte du sorgho. Les populations de la plupart des nématodes phytoparasites dans le sol ont tendance à culminer en cette période, une fois que la partie aérienne des cultures s'est fanée ou est morte (Celetti, 2006). Au total, 102 échantillons ont été prélevés sur les trois sites : 54 échantillons à Saria I, 30 échantillons à Saria II, 12 échantillons à Saria III et 6 échantillons dans les jachères bordant les sites. Les échantillons de sols ont été placés dans des sacs en plastique attachés et étiquetés, à l'abri des rayons du soleil dans un endroit frais et transportés vers le Laboratoire de Nématologie du Centre Régional de Recherches Environnementales et Agricoles (CRREA) de Farako-Bâ (Bobo Dioulasso, Burkina Faso) pour l'extraction et l'identification des nématodes.

2.3. Extraction des nématodes

33L'extraction a été faite en utilisant la méthode de l'élutriateur de Seinhorst (Merny et al., 1969). Une fraction de sol de 250 cm3 a été prélevée par échantillon et soumise aux trois phases que comporte cette méthode d'extraction : la phase d'élutriation, la phase de tamisage et la phase de filtration active qui sépare les nématodes des impuretés du sol sur la base de leur mobilité. Après extraction, le dénombrement des nématodes est effectué à l'aide de la plaque de comptage sous la loupe binoculaire. Les effectifs de la population sont exprimés en nématodes par dm3 de sol (N.dm-3).

2.4. Analyse des données

34Les données obtenues ont été introduites dans le tableur Excel 2003 et soumises à l'analyse de variance (ANOVA), General Linear Model (GLM) en utilisant Minitab version 13.0. La matrice d'analyse est un « full rank » constitué des facteurs (type de culture et type de traitements) et des variables constituées par les espèces de nématodes identifiées.

3. Résultats et discussion

35Au total, sept espèces de nématodes ont été identifiées dans les trois sites. Il s'agit de Pratylenchus brachyurus (Godfrey, 1929) (Famille : Hoplolaimidae, sous-famille : Pratylenchinae), Tylenchorhynchus martini (Cobb, 1913) (Famille : Tylenchidae), Helicotylenchus multicinctus (Cobb, 1893) (Famille Hoplolaimidae), Scutellonema cavenessi (Andrassy, 1958) (Famille : Hoplolaimidae), Criconemoïdes curvatum (Raski, 1952) (Famille : Criconematidae), Telotylenchus indicus (Siddiqi, 1960) (Famille : Tylenchidae) et Xiphinema sp. (Cobb, 1913) (Famille : Dorylaimidae). Leurs densités varient de 0 à 11 900 par dm3 de sol, selon le site.

3.1. Saria I

36Les résultats à Saria I montrent que cinq espèces de nématodes ont été recensées dont trois espèces (P. brachyurus, T. martini et H. multicinctus) représentent plus de 98 % du nombre de nématodes. L'analyse statistique montre la corrélation entre la densité des populations des différentes espèces par rapport aux facteurs types de culture et types de traitement (Tableau 1). Des cinq espèces, T. martini et P. brachyurus ont été signalées comme étant liées à la culture du sorgho (Mc Donald et al., 2005). P. brachyurus est un nématode endoparasite migrateur à tous les stades de son développement, qui a une vie libre à l'intérieur de la racine où il se déplace et crée des dommages en ponctionnant les cellules à l'aide de son stylet creux (Bélair, 2005). Il pond ses œufs à l'intérieur de la racine et leur éclosion entraine le pourrissement des tissus et la libération des larves. T. martini est un nématode qui peut être ectoparasite migrateur, semi-endoparasite ou endoparasite (NDiaye, 1994). Il peut se reproduire en pondant ses œufs à l'extérieur de la racine, au contraire de P. brachyurus. Des deux espèces, P. brachyurus est signalée comme l'espèce omniprésente et fréquemment liée à la culture du sorgho (Luc, 1960 ; Motalaote et al., 1987 ; De Waele et al., 1988 ; McDonald et al., 2005). Nos résultats confirment cela par le fait que des deux espèces, seule P. brachyurus a la densité de sa population significativement corrélée au facteur type de culture (p = 0,002), à la différence de T. martini (p = 0,892). Les traitements T3 et T5 qui associent le fumier et la fumure minérale et l'exportation de la paille représentent pour chaque rotation les traitements les moins infestés, en particulier par P. brachyurus et T. martini (Tableaux 2, 3 et 4). Le traitement T2 (fumure minérale faible + recyclage de la paille de sorgho) de la rotation sorgho continu est le plus infesté par P. brachyurus avec plus de 3 500 individus par dm3 de sol (Tableau 2). Cette espèce très faiblement représentée disparait dans les rotations sorgho – coton (SC) et sorgho – niébé (SN) avec respectivement 20 et 13 individus par dm3 de sol (Tableaux 3 et 4). Cette observation confirme le statut d'espèce principale inféodée au sorgho de P. brachyurus. Cette différence de comportement de ces deux espèces par rapport à la rotation culturale pourrait s'expliquer par leur mode de vie et de reproduction. On peut émettre l'hypothèse selon laquelle P. brachyurus étant un endoparasite strictement associé au sorgho, ne peut survivre et se reproduire sans sa plante hôte, tandis que T. martini aurait d'autres plantes hôtes.

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37De façon générale, la rotation sorgho continu est la plus infestée en nématodes. Ces résultats montrent que la rotation culturale permet de contrôler l'infestation par les nématodes, ils corroborent des observations faites par des travaux antérieurs (Bachelier, 1978 ; Reversat, 1988 ; Cadet, 1998 ; Bélair, 2005 ; Talwana et al., 2008). En particulier, il a été démontré que la culture du sorgho en rotation comportant des légumineuses améliore la nutrition azotée ainsi que les rendements et était moins infectée par les nématodes (Bado, 2002).

38Les traitements associant la fumure minérale de faible dose seule ou avec le recyclage de la paille (T2, T4) se sont révélés par contre moins bénéfiques pour le contrôle des nématodes. Le recyclage de la paille qui augmente les stocks de matières organiques du sol (Feller et al., 1987 ; Sedogo, 1993) n'aurait donc qu'un effet limité pour le contrôle des nématodes du sorgho. Les différents traitements appliqués induisent des variations des éléments chimiques de la matière organique du sol. Ces variations s'accompagnent de variations de l'abondance de certaines espèces de nématodes (Cadet, 1998). Cela pourrait être dû au fait que certains amendements stimulent la flore microbienne du sol et ont un effet de répression sur les populations de nématodes phytoparasites (Bélair, 2005).

3.2. Saria II

39À Saria II où sept espèces de nématodes ont été inventoriées, on observe également une prédominance des espèces P. brachyurus et T. martini qui représentent plus de 95 % des individus. L'analyse statistique révèle qu'une seule espèce, P. brachyurus, a la densité de sa population significativement corrélée au type de traitement (p = 0,000) (Tableau 1). L'apport d'azote s'est traduit par une hausse de l'infestation par P. brachyurus et T. martini pour tous les traitements, exception faite du traitement avec incorporation de compost anaérobie (Tableau 5). Ceci est particulièrement significatif avec le traitement avec incorporation de fumier où l'apport d'azote a augmenté de manière très significative l'infestation en nématodes. Certaines matières organiques exogènes par leur composition visent, non pas à lutter directement contre les nématodes parasites, mais à donner une plus grande vigueur à la plante qui pourra mieux se défendre contre les nématodes (Sarah et al., 1991 ; Dmowska et al., 1995). D'autres matières organiques exogènes peuvent favoriser la prolifération d'organismes parasites ou prédateurs des nématodes (Bachelier, 1978 ; Bélair, 2005 ; Forge et al., 2009). Pour le fumier, le compostage accroît considérablement la prolifération de ces organismes parasites ou prédateurs des nématodes (Bélair, 2005). On pourrait expliquer le résultat obtenu avec le traitement F(+N) par le fait que ce traitement augmente la résistance des plants face aux parasites, mais que l'apport d'azote a été favorable aux nématodes dans un milieu pauvre en organismes prédateurs. L'apport d'azote n'a donc pas affecté les populations de nématodes ; les niveaux de populations dans les parcelles fertilisées sont dans bien des cas (traitements témoin, avec compost anaérobie, fumier et paille) plus importants que ceux observés dans les parcelles non fertilisées. Des observations similaires sur des parcelles de riz avaient été faites avec une fertilisation en azote sous forme d'urée (Gnonhouri et al., 1989).

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3.3. Saria III

40P. brachyurus et T. martini constituent également les deux principaux nématodes des cinq espèces qui ont été inventoriées sur Saria III. H. multicinctus qui est la troisième plus importante espèce observée est la seule avec une densité de population significativement corrélée au type de traitement avec p value = 0,036 (Tableau 1). Quel que soit le type du travail du sol pratiqué, l'apport du fumier entraine une baisse de l'infestation en nématodes (Tableau 6). Par type de travail du sol, nos résultats montrent que le labour aux bœufs affecte plus les nématodes, en particulier l'espèce P. brachyurus par rapport au labour manuel. On pourrait expliquer l'effet plus sensible du labour aux bœufs par la profondeur atteinte lors de ce type de labour. Le labour manuel est effectué à 3-5 cm de profondeur et le labour aux bœufs à 15-20 cm. Les nématodes étant échantillonnés à 20 cm seraient alors affectés par le labour profond. On pourrait penser en particulier qu'ils sont ramenés en surface et exposés à la dessiccation lors du labour profond.

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41Dans les jachères bordant les trois essais, la nématofaune plus diversifiée est représentée par sept espèces, avec une prédominance des espèces T. martini et H. multicinctus. L'espèce P. brachyurus est très faiblement présente dans les jachères (Tableau 7), ce qui confirme son statut d'espèce liée à la culture du sorgho souligné plus haut. Les espèces qui sévissent dans les champs cultivés ont fortement régressé ou disparu dans les jachères. Ces observations sont conformes aux résultats de travaux antérieurs (Cadet, 1998 ; Bois et al., 2000). L'une des raisons de la disparition de certains nématodes dans la jachère pourrait être l'absence de leur plante-hôte pour les espèces qui sont inféodées à une culture, comme c'est le cas de P. brachyurus.

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4. Conclusion

42Cette étude a identifié les nématodes liés à la culture du sorgho sur les trois sites étudiés et dans les jachères bordant ces sites. Les espèces de nématodes identifiées ont montré des comportements divers par rapport aux pratiques culturales. Certains des résultats corroborent notre hypothèse selon laquelle les pratiques agricoles ont une influence sur la composition des populations de nématodes. Les rotations culturales pratiquées, certaines fumures minérales et organiques et le type de labour permettent de contrôler l'infestation du sorgho par les nématodes, en particulier l'infestation par P. brachyurus et T. martini, les deux principales espèces qui lui sont inféodées.

43Remerciements

44Nous remercions les techniciens de recherche, Sanou Martin à la Station de Recherches Agricoles de Saria et Kièmdé Salam au Laboratoire de Nématologie du Centre Régional de Recherches Environnementales et Agricoles de Bobo-Dioulasso pour leur appui lors des travaux de terrain et d'extraction des nématodes. Nous remercions également Diallo Boukary Ousmane et Guissou Tibi, Chargés de Recherches à l'Institut de l'Environnement et de Recherches Agricoles pour leur appui dans le traitement statistique des données.

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Om dit artikel te citeren:

Mamoudou Traoré, François Lompo, Bouma Thio, Badiori Ouattara, Korodjouma Ouattara & Michel Sedogo, «Influence de la rotation culturale, de la fertilisation et du labour sur les populations de nématodes phytoparasites du sorgho (Sorghum bicolor (L.) Moench)», BASE [En ligne], volume 16 (2012), numéro 1, 59-66 URL : http://popups.ulg.be/1780-4507/index.php?id=8403.

Over : Mamoudou Traoré

Institut de l'Environnement et de Recherches Agricoles (INERA). Département Productions Forestières. 03 BP 7047. BF-Ouagadougou 03 (Burkina Faso). E-mail : tramadalbela@yahoo.fr

Over : François Lompo

Institut de l'Environnement et de Recherches Agricoles (INERA). Laboratoire Sol-Eau-Plantes. 04 BP 8645. BF-Ouagadougou 04 (Burkina Faso).

Over : Bouma Thio

Institut de l'Environnement et de Recherches Agricoles (INERA). Laboratoire de Nématologie. Station de Farako-Bâ. 01 BP 910. BF-Bobo Dioulasso 01 (Burkina Faso).

Over : Badiori Ouattara

Institut de l'Environnement et de Recherches Agricoles (INERA). Laboratoire Sol-Eau-Plantes. 04 BP 8645. BF-Ouagadougou 04 (Burkina Faso).

Over : Korodjouma Ouattara

Institut de l'Environnement et de Recherches Agricoles (INERA). Station de Recherche de Saria. Laboratoire Sol-Eau-Plantes. BP 10. BF-Koudougou (Burkina Faso).

Over : Michel Sedogo

Institut de l'Environnement et de Recherches Agricoles (INERA). Laboratoire Sol-Eau-Plantes. 04 BP 8645. BF-Ouagadougou 04 (Burkina Faso).