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- Volume 29 (2025)
- Numéro 3
- Dynamique des sédiments exportés dans les bassins versants forestier et agricole de la partie ouest de la région du lac Kivu, République Démocratique du Congo
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Dynamique des sédiments exportés dans les bassins versants forestier et agricole de la partie ouest de la région du lac Kivu, République Démocratique du Congo

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Description du sujet. Réalisée à l’Ouest de la région du lac Kivu, cette étude a évalué les facteurs qui contrôlent les variations spatio-temporelles de la production des sédiments dans deux bassins versants couvrant une superficie de 25 km2.
Objectifs. Cette étude vise à étudier la dynamique temporelle d’exportation des sédiments en suspension et à quantifier la charge sédimentaire au sein de bassins versants avec des terres contrastées dans la région du lac Kivu.
Méthode. Le débit d’eau journalier et le total des sédiments en suspension ont été mesurés. Les changements temporels de la végétation et d’érosivité des précipitations ont été analysés pour évaluer leur influence sur le débit et le rendement en sédiments.
Résultats. Nous avons constaté que certains orages majeurs contribuaient à l’exportation de sédiments, en particulier pour le bassin versant agricole où une superficie d’environ 100 ha couverte de sédiments était présente. Un modèle de régression linéaire peut prédire avec succès l’exportation mensuelle de sédiments en utilisant uniquement l’érosivité des précipitations, la topographie et la couverture végétale (R2 = 0,87***). Nous avons obtenu un rendement annuel en sédiment de 0,5 t·ha-1·an-1 pour Mushuva et 15,3 t·ha-1·an-1 pour Renga. Les valeurs élevées de rendement en sédiments dans le bassin versant agricole sont parmi les plus élevées et sont attribuées à l'application minimale de conservation des sols, à la déforestation accélérée et aux orages fréquents.
Conclusions. Il serait intéressant d'utiliser des techniques de protection des sols dans les bassins versants afin de réduire les exportations de sédiments.
Abstract
Dynamics of exported sediments in the forest and agricultural catchment of the western part of the Lake Kivu region, Democratic Republic of Congo
Description of the subject. Located in the southern part of Lake Kivu, this study attempted to investigate the factors controlling spatial-temporal variations of sediment yields in two catchments with contrasting land use (pristine forest versus agriculture).
Objectives. This study aimed to investigate the temporal dynamics of suspended sediment export and to quantify sediment load in catchments with contrasting land uses in the Lake Kivu region.
Method. Daily water discharge into vegetation and rainfall erosivity were analyzed to evaluate their influence on discharge and sediment yield.
Results. We found that a few large storm events contributed disproportionally highly to the export of sediments for the agricultural catchment where an area of approximately 100 ha covered with sediments was present. A linear regression model was able to successfully predict monthly sediment export using only rainfall erosivity, topography and vegetation cover (R2 = 0.87***). However, vegetation indices derived from remote sensing could only explain 20% of the observed variability in soil cover management. We obtained the annual sediment yield (SY) of 0.5 t·ha-1·yr-1 and 15.3 t·ha-1·yr-1 for the pristine forest and cultivated catchment, respectively. The SY values in the cultivated catchment are among the highest reported for the region and are attributed to the low vegetation cover and frequent storms, minimal application of soil conservation measures, and accelerated deforestation.
Conclusion. Methods for reducing TSS export should therefore be initiated in the agricultural catchments to protect the soil on the slopes and prevent further soil degradation in this region.
Tabla de contenidos
Reçu le 2 avril 2024, accepté le 25 février 2025, mis en ligne le 22 mai 2025.
Cet article est distribué suivant les termes et les conditions de la licence CC-BY (http://creativecommons.org/licenses/by/4.0/deed.fr)
1. Introduction
1Le changement d’utilisation des terres et la déforestation constituent une menace sérieuse pour les écosystèmes forestiers vierges. Les forêts tropicales sont des points chauds pour la biodiversité (Gaston, 2000) et fournissent des moyens de subsistance aux populations de la région (Chhatre & Agrawal, 2009). Cependant, l’augmentation de la population dans les régions tropicales et l’augmentation de la déforestation agricole qui en résulte mettent ces écosystèmes précaires sous pression (Archard et al., 2014). À l’échelle mondiale, les estimations de la perte de forêt pantropicale dans les années 2000 sont d’environ 7,6 millions d’hectares (Archard et al., 2014). Selon les informations publiées par l’Université du Maryland, les tropiques ont perdu 11,1 millions d’hectares de couverture arborée en 2021 (www.globalforestswatch.org, 2021). La déforestation accélère les modifications d'utilisation des sols et favorise l'érosion de ces derniers par le flux de sédiments dans les rivières (Pelletier, 2012 ; Bidorn et al., 2018). Le flux de sédiments par les rivières vers les lacs, les mers et les océans constitue l’une des plus importantes menaces des écosystèmes fluviaux du monde entier (Pelletier, 2012 ; Bidorn et al., 2016). La grande proportion de sédiments, transportés par de nombreux fleuves et rivières, provient des terres agricoles érodées (Walling & Fang, 2003). Les activités anthropiques ont de la même manière augmenté le transport de sédiments par les rivières à l'échelle globale (2,3 milliards de tonnes par an ; Syvitski et al., 2005). La croissance démographique et les changements climatiques ont des impacts sur l’occupation des sols (Odada et al., 2009 ; Vanmaercke et al., 2014).
2Avec une densité moyenne de 160 habitants·km2, la région du lac Kivu est l’une des zones les plus densément peuplées du continent africain et s’appuie en grande partie sur l'agriculture de subsistance et l'utilisation du charbon de bois pour les besoins énergétiques (Courtois & Manirakiza, 2015). La demande croissante en nourriture et en énergie exerce une forte pression sur les écosystèmes forestiers, entraînant des taux élevés de déforestation dans la région (Karamage et al., 2016 ; Bagalwa et al., 2021). Les sédiments en suspension peuvent avoir un impact sur la qualité de l’eau potable et affecter le réseau fluvial (Lal, 2009).
3À l’échelle de la région du Kivu, très peu d’études ont été réalisées sur les observations et la quantification des sédiments exportés. Nous citons, par exemple, les études de Sichingabula (1999), Kakogozo et al. (2000), Bagalwa et al. (2015) et Azanga et al. (2016), dans lesquelles des informations importantes sur les flux des sédiments dans les bassins versants de la partie occidentale du lac Tanganyika et du bassin versant de Lwiro au sud-ouest du lac Kivu ont été présentées. Il existe relativement peu de données quantitatives sur l’apport en sédiments et les effets de la déforestation pour la région du lac Kivu en particulier et l’Afrique tropicale en général. Le changement de couverture du sol et les changements dans la dynamique des sédiments dans les torrents de montagnes tropicales ne sont pas bien quantifiés (Vanmaercke et al., 2014 ; Lizaga et al., 2025).
4Des séries chronologiques de données sur la concentration des sédiments en suspension (CSS) et les débits (Q) peuvent être utilisées pour mieux comprendre la dynamique des sédiments. Les boucles d'hystérésis décrivent l'évolution temporelle de la relation de la concentration des sédiments en suspension et les débits et permettent d’interpréter la réponse de cette concentration en fonction de la disponibilité des sédiments (Williams, 1989). L’hystérésis est généralement étudiée à l’échelle de l’évènement mais les variations saisonnières peuvent également fournir des informations sur le processus hydro-sédimentaire (Zhang et al., 2021 ; Baumgartner et al., 2022). Lorsqu’il n’y a pas d’effet d’hystérésis, la CSS n’est limitée que par la capacité de transport (Q) avec un apport illimité de sédiments. D’un autre côté, lorsque la relation dépend du temps, une hystérésis se produit et est provoquée par l’apport et le stockage de sédiments qui varient dans le temps.
5L’objectif majeur de ce travail était de quantifier la dynamique temporelle d’exportation des sédiments en suspension et de quantifier la charge sédimentaire au sein de bassins versants présentant des utilisations des terres contrastées dans la région du lac Kivu. Les objectifs spécifiques de la présente étude se résument ainsi :
6– quantifier la dynamique des précipitations, la gestion de couverture des sols et la charge sédimentaire en suspension ;
7– comparer la dynamique des milieux forestiers et agricoles ;
8– connaître les raisons de la différence d’exportation des sédiments en suspension entre les deux bassins versants en analysant les facteurs d’érosion des sols tels que la pluie et les activités humaines.
2. Méthode
2.1. Description de la région d’étude
9Cette étude a été menée à l’ouest du lac Kivu dans deux bassins versants : celui de Renga, cultivé, au Nord-Kivu dans le territoire de Masisi et celui de Mushuva au Sud-Kivu dans le territoire de Kabare, occupé par la forêt vierge du parc national de Kahuzi-Biega (Figure 1). La distance occupée par la forêt naturelle de Kahuzi-Biega entre les deux bassins versants est de 79,85 km.
Figure 1. Localisation de la région d’étude : 1. Afrique, 2. RD Congo, 3. Région du Kivu (Nord et Sud-Kivu), 4. Bassin versant Renga dans le territoire de Masisi, 5. Bassin versant Mushuva dans le territoire de Kabare. La carte d’utilisation du sol provient du satellite copernicus-100m (https://land.copernicus.eu-100m, 2019) — Location of study area: 1. Africa, 2. DR Congo, 3. Kivu region (North and South Kivu), 4. Renga watershed in Masisi territory, 5. Mushuva watershed in Kabare territory. The land use map is from copernicus-100m (https://land.copernicus.eu-100m, 2019).
10Du point de vue climatique, la région d'étude possède des précipitations annuelles de 1 200 à 1 550 mm. Avec des altitudes de 2 000 à 3 500 m, les températures sont comprises entre 15 et 20 °C (Ilunga et al., 2004 ; Muhire et al., 2015 ; Karamage et al., 2016).
11Le régime de précipitations de ces deux bassins versants est en grande partie bimodal, avec une longue saison humide s’étalant de janvier-février à juin et de septembre à décembre ; une longue saison sèche s’étendant de juillet à août et une courte saison humide à partir de janvier à février intermittent d’une courte saison sèche de quelques jours (Ndayirukiye & Sabushimike, 2015).
12La lithologie est constituée de roches volcaniques basiques intrusives, alcalines et métamorphiques sédimentaires ignées à Mushuva. Par contre, à Renga, la lithologie est à prédominance volcanique basique comprenant les basaltes, ash, tuff et laves (Dewitte et al., 2013 ; Nahimana, 2015). Du point de vue pédologique, les Ferralsols humides tropicaux caractérisés par les hydroxydes de fer et d’aluminium dominent dans le bassin versant de Mushuva (Bauters et al., 2019) avec une texture sablo-alluvionnaire dans la partie supérieure et une texture limono-alluvionnaire dans les couches plus profondes du sol (Baumgartner et al., 2021). Le bassin versant de Renga est le domaine privilégié des Acrisols et des Andosols jeunes et fertiles sur les terrains volcaniques et d’une texture sablo-limoneuse (Dewitte et al., 2013 ; Nahimana, 2015).
13Du point de vue du couvert végétal, ces deux bassins versants sont marqués par une distribution végétale différente (Tableau 1). Les couvertures forestières sont plus importantes à Mushuva (60,6 %) qu’à Renga (7,7 %), les prairies occupent 24,8 % à Mushuva contre 31,4 % à Renga (https://land.copernicus.eu, 2015 ; Buchhorn et al., 2020). Les sols de Mushuva sont couverts d'une forêt tropicale ombrophile et mixte montagnard du Rift, avec des strates mono dominant de bambouseraie et de prairies (60 %) (Karhagomba, 2015).
2.2. Dynamique de la couverture du sol
14Deux indices spectraux ont été utilisés afin d’évaluer la dynamique temporelle de la végétation dans les deux bassins versants : le NDVI (Normalized Difference Vegetation Index ou Différence Normalisée d’Indice de Végétation) et le BSI (Bare Soil Index ou Indice de Sol Nu) calculés à l’aide des données du satellite Sentinel-2 MSI, Level 2A, de 10 m de résolution spatiale. Les images collectées couvrent une période de 5 ans, de 2018 à 2022. La région d’étude étant nuageuse, nous avons supprimé les pixels avec couverture nuageuse (environ 50 % des scènes ont été retenues) de l’analyse et généré un composite final pour le NDVI et le BSI, aux échelles de temps mensuelle et annuelle en utilisant la valeur médiane. Les calculs ont été effectués à l’aide de Google Earth Engine.
2.3. Mesures des précipitations et de débit
15Dans le bassin versant Mushuva, les données pluviométriques utilisées pendant la période d'observation proviennent de la station météo de Bugulumiza. Elles ont été mesurées à l'aide d'une station météo Tahmo (modèle ATMOS 41 All in-one, Meter Environment, Pullman, USA, résolution temporelle 5 min, précision 5 %). Cette station est située à une distance de 2 km à partir du site de mesures et à une altitude de 2 425 m. Ensuite, sur site dans la rivière Mushuva, un canal en béton d’une largeur fixe de 1,75 m et d’une longueur de 4 m a été construit pour effectuer les mesures hebdomadaires de débit. Premièrement, les mesures de vitesse du courant d'eau ont été réalisées à l'aide d'un courantomètre mécanique à hélice (modèle 2030, General Oceanic, Inc., États-Unis). Deuxièmement, les mesures de hauteur du lit (en m) ont été réalisées à l'aide d'un TD-DIVER et d'un BARO-DIVER (modèle 11.11 TD-DIVER et 11.11 BARO-DIVER, précision 0,05 %/100 m, résolution métrique 0,36 cm d'eau et résolution temporelle 5 min, Eijkelkamp Academy, The Netherlands). Ces instruments ont été installés pour corriger les erreurs détectées lors de l'enregistrement des données. Le calcul offset utilisant les données de mesures TD-DIVER et celles du niveau d’eau du lit a été effectué pour corriger les erreurs de mesures et d’enregistrement des données. Le calcul offset utilisant les données de mesures manuelles simultanées du niveau d’eau et celles du TD-DIVER a été effectué par l’expression suivante :
16où Offset est le facteur de correction d’erreurs de mesures.
17L’offset calculé a été ajouté au niveau du DIVER pour obtenir le niveau final d’eau du lit de la rivière par l’équation 2 :
18où Nfe est le niveau final d’eau du DIVER exprimé en mètre.
19Les données du niveau final d’eau du lit ont été utilisées dans le calcul de la section mouillée mesurée en m2. Enfin, le produit de la vitesse du courant (m·s-1) à la section mouillée (m2) a été calculé pour obtenir le débit observé de la rivière (en m3·s-1). Pour calculer les valeurs finales de débit (que nous avons analysé à l’échelle journalière) à chaque point de mesure du niveau final d’eau et des données de pressions continues, une courbe fiable de régression linéaire de débit-niveau final d’eau du DIVER (Figure 2) a été construite.
Figure 2. Modèle linéaire de débit du bassin versant Mushuva sous forêt vierge, de septembre 2018 à avril 2020 — Linear flow model of the Mushuva watershed under virgin forest, from September 2018 to April 2020.
20Les mesures de débit de la rivière Mushuva ont commencé le 17 septembre 2018. Du 17 septembre 2018 au 27 avril 2020, les données mesurées ont été analysées pour produire le modèle de débit. Au total, 82 données ont été analysées. Il manque des données du 28 avril 2020 au 17 janvier 2021 pour des raisons logistiques (problèmes de surveillance, batteries défectueuses). Les mesures de débit ont repris du 18 janvier au 31 décembre 2021 sans interruption en utilisant le courantomètre mécanique à hélice (modèle 2030, General Oceanic, Inc., États-Unis). Les mesures de débit de cette rivière ont été réalisées trois fois par jour à 7 h, 14 h et 17 h. Au total, 348 données de débit ont été mesurées pendant cette période.
21Dans la rivière Renga, une colonne en béton fixe a été construite sur site pour la stabilité des mesures de débit. Les mesures de débit ont été réalisées à l’aide d’un courantomètre mécanique à hélice. Les données journalières ont été mesurées trois fois par jour à 7 h, 14 h et 17 h, du 1 janvier au 31 décembre 2021. La courbe de régression linéaire n’a pas été appliquée au calcul du débit car la berge de la rivière sur site n’était pas suffisamment stable. Le débit moyen journalier a été calculé et au total, 365 données journalières ont été obtenues pour la rivière Renga. Une station météorologique (TAHMO, précision 5 % et résolution temporelle 5 min) a été installée à Bweremana à 4 km à partir du site de mesure afin de définir clairement les différentes saisons pluviométriques dans le bassin versant de Renga.
2.4. Mesure de Concentration des Sédiments en Suspension (CSS)
22Collecte et analyse d’échantillons. De janvier à décembre 2021, les échantillons d’eau ont été collectés dans des bouteilles en PEHD de 150 ml à une fréquence journalière dans les deux sites de mesures. Tous les échantillons d’eau collectés ont été filtrés au laboratoire sur des filtres Whatman, États-Unis, GF/C et GF/F, Glass-Microfibre DISS VWR 516-0817, Qualitative filter paper, 110-413 mm, avec un seuil de porosité de 5-13 μm. Les filtres contenant les sédiments ont été ensuite séchés à 50 °C pendant 48 h à l’étuve puis pesés. La CSS a été calculée en divisant la masse de sédiments par le volume d’eau filtrée.
23Au total, pour la période d’observation, à raison de trois échantillons par jour, nous avons collecté 948 échantillons de CSS au site Renga, avec une moyenne de 365 données journalières et 399 échantillons de CSS au site Mushuva, avec une moyenne de 348 données journalières.
24Calcul du débit des sédiments en suspension et d’apport en sédiments. La concentration journalière de sédiments en suspension et le débit ont été utilisés pour calculer le débit solide par l’équation suivante :
25où Qs est le débit solide (en kg·s-1), Q est le débit liquide (en m3·s-1) et CSS est la concentration des sédiments en suspension (en g·l-1). Le débit des sédiments en suspension produit la charge sédimentaire (TSS) journalière calculée pendant toute la période d’observation, lors des évènements pluvieux et non pluvieux par l’équation 4 (Khanchoul et al., 2007) :
26où TSS est la charge journalière des sédiments en suspension exprimée en tonnes, Qs est le débit solide journalier (en kg·s-1) et T est le temps (= 86 400 s). Le TSS annuel est estimé en additionnant les valeurs journalières et est divisé par la superficie du bassin versant pour obtenir le rendement annuel en sédiments exportés, exprimé par l’équation suivante :
27où SY est le rendement annuel en sédiments ou Sediment Yield (en t·ha-1·an-1), n représente le nombre de données mesurées, i représente le nombre de mesures et A est la superficie (ha) du bassin versant.
2.5. Hystérésis de sédiment (CSS)-débit (Q)
28En raison du grand nombre d’évènements orageux, une technique de traitement du signal par filtre numérique du package R EcoHydrRology (Fuka et al., 2015) a été utilisée pour séparer l’hydrogramme de débit en flux d’évènements et débit de base. Le débit de base est la partie de l’hydrogramme qui maintient le débit entre les évènements de précipitation et réagit lentement à ces évènements. Pour chaque évènement d’orage, un indice d’hystérésis numérique (HI) a été calculé pour analyser la dynamique d’exportation de sédiments lors d’un évènement d’orage (Lloyd et al., 2016).
2.6. Gestion de la couverture des sols
29Bien que le modèle RUSLE présente plusieurs limites, il est utile de conceptualiser les facteurs contribuant à la modélisation des sédiments. Afin d’évaluer la dynamique temporelle d’occupation du sol (facteur-C) dans les deux bassins versants contrastés, nous avons utilisé quatre facteurs. Il s’agit de : facteur d’érosivité des pluies (facteur-R) basé sur nos observations, d’érodibilité (facteur-K) et d’inclinaison de la pente (facteur-S) du modèle RUSLE (Almagro et al., 2019) et le rendement en sédiments (SY en t·ha-1). Le facteur-C est ainsi exprimé par l’équation suivante :
30où SY est la perte de sol calculée par unité de surface. Les valeurs d’érosivité des précipitations ou facteur-R ont été estimées à partir des quantités de précipitations (Vr), de l’énergie cinétique de précipitations et de l’intensité de précipitations à la résolution temporelle de 30 min (Bagalwa et al., 2021). Le facteur-S est dérivé du radiomètre ASTER – GDEM, de résolution spatiale 30 m, USGS. Avec l’utilisation du modèle RUSLE pour déduire les facteurs de gestion de la couverture (Facteur-C), nous supposons implicitement qu’aucun dépôt ne se produit. Nos observations sur terrain indiquent que dans ces bassins versants accidentés, il existe très peu de potentiel de stockage de sédiments. Bien que nous ne puissions pas totalement exclure qu’un dépôt se produise, nous affirmons qu’il s’agit probablement d’une petite fraction qui ne devrait pas affecter de manière substantielle nos interprétations concernant le facteur de couverture. On suppose bien que L = 1 ou L = 22 m. Il s’agit d’une hypothèse raisonnable dans la mesure où le facteur de longueur de pente représente la longueur d’un champ jusqu’à ce que le dépôt soit atteint (par exemple, Van Oost et al., 2000). Notez également qu’il s’agit d’une étude comparative dans deux bassins versants topographiquement similaires, cela ne devrait donc pas avoir d’impact substantiel sur nos interprétations. Du fait que les longueurs de pente, la morphologie du bassin versant et les connectivités sont négligeables ; que les dimensions des champs sont petites et qu’il n’existe aucune pratique de gestion et conservation des sols (P = 1 ; Renard et al., 1997), nous avons uniquement pris en compte les facteurs RKS et nous avons exclu les facteurs L et P dans l’équation. Le facteur-K est le facteur d’érodibilité du sol. Pour chaque bassin versant, nous avons calculé les valeurs globales du facteur-K en nous référant aux caractéristiques texturales de Wischmeier & Smith (1978) (M est le pourcentage de teneur en limons plus fraction de sable fin multiplié par 100 moins fraction d’argile), matière organique (MO, en pourcentage), structure du sol et classes de perméabilité du sol (p) :
31Nous avons utilisé les cartes ISRIC SoilGrids pour estimer les paramètres de calcul du facteur-K.
2.7. Variation d’apport en sédiments avec l’érosivité des précipitations et les paramètres végétaux
32Le but de cette section est de vérifier l’hypothèse selon laquelle l’apport en sédiments s’explique par l’érosivité des précipitations en interaction avec la couverture du sol. Pour cela, un simple modèle linéaire a été produit (8) :
33où SY est le rendement en sédiments (en t·ha-1·mois-1). Cette analyse a été effectuée sur base des données mensuelles de SY. Nous avons inclus la topographie (S) dans l’équation car les deux bassins versants ont un gradient de pente légèrement différent.
3. Résultats
3.1. Dynamique spatio-temporelle du couvert végétal
34La figure 3 montre le changement temporel de Différence Normalisée d’Indice de Végétation (NDVI) et d’Indice de Sol Nu (BSI) pour la période 2018 à 2022. Dans les deux bassins versants, la NDVI est respectivement de 0,79 à Mushuva contre 0,68 à Renga, tandis que le BSI est de -0,26 à Mushuva contre -0,17 à Renga. Comme attendu, ces deux indices indiquent que le site forestier est plus densément végétalisé et comporte moins de sols nus. La NDVI dans le bassin versant forestier reste relativement constant tout au long de l’année, tandis qu’elle change substantiellement dans le bassin versant des terres cultivées où les valeurs les plus basses sont observées en octobre (Figure 3). Les valeurs BSI plus élevées (> 0,02) indiquent une surface de sol nu. Il existe une forte corrélation entre les indices BSI et NDVI (R2 = 0,76***). À Mushuva, les précipitations maximales sont observées en mars et novembre alors qu’à Renga, les pics de précipitations sont observés en avril et octobre. Les précipitations sont un facteur clé influençant la NDVI et le BSI.
35La différence entre les deux bassins versants est plus prononcée en février, mars et août, septembre, ce qui est logique car ces périodes correspondent aux récoltes des produits agricoles mais également à la préparation des champs au semis.
Figure 3. Changement temporel de Différence Normalisée d’Indice de Végétation (NDVI), d’indice de sol nu (BSI) et de précipitation (mm) dans les bassins versants Mushuva sous forêt vierge et Renga sous terres cultivées, valeurs médianes pour la période 2018-2022 — Time change of Normalized Difference of Vegetation Index (NDVI), Bare Soil Index (BSI) and Precipitation (mm) in the Mushuva watersheds under virgin forest and Renga under cultivated land, median values for 2018-2022.
36Les agencements spatiaux (Figure 4) montrent que Mushuva est couvert d’une végétation dense, tandis que les pentes plus abruptes des parties supérieures du bassin versant Renga présentent moins de végétation.
Figure 4. Médiane annuelle de Différence Normalisée d’Indice de Végétation (NDVI) et d’indice de sol nu (BSI) dans les bassins versants (a) Mushuva sous forêt vierge et (b) Renga sous terres cultivées, représentative pour la période 2018 à 2022 — Annual median of Normalized Difference in Vegetation Index (NDVI) and Bare Soil Index (BSI) in (a) the Mushuva watersheds under virgin forest and (b) the Renga Watersheds under cultivated land representative for the period 2018 to 2022.
3.2. Débit et exportation journaliers des sédiments
37Les débits journaliers observés à Mushuva sont très variables au cours de la période d’observation et atteignent un maximum de 2 m3·s-1 (Figure 5) alors que ceux à Renga sont plus faibles, atteignant un maximum de 0,65 m3·s-1 et sont moins variables au cours de l’année (CV de 24 %) par rapport à Mushuva (CV de 72 %). Contrairement au débit, la CSS est plus élevée pour la rivière Renga et présente une variabilité beaucoup plus élevée (CV de 34,6 %). La CSS moyenne annuelle est de 0,04 g·l-1 pour Mushuva contre 1,42 g·l-1 pour Renga.
Figure 5. Chronologie des mesures de débit (Q) et de CSS dans les rivières Mushuva et Renga, de janvier 2021 à janvier 2022 — Timeline of flow (Q) and CSS measurements in the Mushuva and Renga rivers, from January 2021 to January 2022.
38Les courbes journalières d’excédent d’exportation annuelle des sédiments montrent que quelques évènements isolés sont responsables d’une fraction substantielle des exportations annuelles.
39Les grands orages (définis par les points de rupture dans les courbes de probabilité d’excédents) (Figure 6) contribuent de manière disproportionnée à l’exportation de sédiments : pour la rivière Renga, 54 % d’exportation annuelle de sédiments se produisent pendant ces évènements d’orages, bien qu’ils ne génèrent que 6 % du débit annuel. Pour Mushuva, une tendance similaire est observée mais elle est beaucoup moins prononcée : 25 % de l’exportation annuelle de sédiments se produisent lors de grands orages, ce qui correspond à 9 % du débit d’eau annuel.
Figure 6. Courbes journalières d’exportations excédentaires des sédiments pour les rivières Mushuva et Renga au cours de l’année 2021 — Daily export surplus sediment curves for the Mushuva and Renga rivers in 2021.
Les points de rupture pour identifier les évènements orageux (lignes verticales pointillées) ont été définis visuellement — Break points to identify storm events (vertical dotted lines) have been defined visually.
40Les relations CSS-Q présentent une grande dispersion des points et des variations saisonnières apparentes pour Renga et Mushuva (Figure 7). À partir de la relation CSS-Q moyenne mensuelle pour la rivière Renga, une tendance générale positive et une boucle dans le sens horaire peuvent être observées, avec des CSS élevées au cours du premier et du dernier mois de l’année et des CSS faibles pendant la période la plus sèche.
Figure 7. Hystérésis dans la relation concentration de sédiments en suspension (CSS)-débit (Q) en utilisant la CSS-Q journalière pour (a) Renga et (b) Mushuva — Hysteresis in the suspension sediment concentration (CSS)-flow (Q) relationship using daily CSS-Q for (a) Renga and (b) Mushuva.
Les points noirs représentent les valeurs moyennes mensuelles et les chiffres indiquent le mois de janvier à décembre 2021 — The black dots represent monthly average values and the numbers show the month from January to December 2021.
41Cependant, sur site à Mushuva, la concentration des sédiments en suspension n'est pas influencée par le débit (Figure 7). Les sédiments en suspension n’ont été transportés que lors de débits faibles, tandis que les débits élevés (> 1 m3·s-1) ont généralement été accompagnés de faibles CSS. La CSS instantanée maximale a été de 0,85 g·l-1 lors de la crue du 25 décembre 2021 et ne coïncidait pas avec le Q maximum.
3.3. Facteurs contrôlant l’exportation des sédiments
42Les précipitations annuelles (1 764 mm à Mushuva contre 1 368 mm à Renga) ont entrainé un ruissellement mesuré dans la rivière de l’ordre de 1 368 mm pour Mushuva et 852,9 mm pour Renga, correspondant à un coefficient de ruissellement annuel de 77 % pour Mushuva et 62 % pour Renga, calculé pendant l’année d’observation. Le ruissellement reflète significativement le régime des précipitations et de débit dans les deux bassins versants (R2 = 0,39 ; p = 0,032 à Mushuva et R2 = 0,53 ; p = 0,007 à Renga).
43Les deux bassins versants sont marqués par une saisonnalité climatique avec la prédominance d’une longue saison humide (saison B) influençant directement la distribution saisonnière de l’érosivité des précipitations.
44Pendant la période d’observation, les deux bassins versants ont été marqués par de grands pics d’érosivité des précipitations en saison humide. Les valeurs les plus élevées d’érosivité annuelle ont été observées dans le bassin versant Mushuva (7 869 MJ mm·ha-1·h-1·an-1) plutôt qu’à Renga (5 308 MJ mm·ha-1·h-1·an-1). Une forte érosivité des précipitations apparaît en saison humide, de septembre à mai dans les deux bassins versants avec un maximum mensuel de 1 170 MJ mm·ha-1·h-1·an-1 en décembre à Mushuva contre 1 105 MJ mm·ha-1·h-1·an-1 en avril à Renga.
45Dans les deux bassins versants, la saison B a constitué la période la plus humide de l’année (Figure 8). On constate un fort dynamisme hydrologique de la rivière Mushuva comparativement à celui de la rivière Renga. Pour Mushuva en particulier, trois saisons hydrologiques sont nettement distinctes (Figure 8) : la saison A avec un débit moyen de 0,55 versus 0,31 ; la saison B avec un débit moyen de 0,91 versus 0,41 et enfin, la saison C avec un débit moyen de 0,10 versus 0,26 à Renga. Le débit moyen au cours de l'année était de l'ordre de 0,52 versus 0,32 à Renga. Les saisons A et B correspondent aux périodes de grands évènements hydrologiques de l’année.
46En ce qui concerne l’apport en sédiments exportés (Figure 8), nous avons obtenu un apport annuel de 15,3 t·ha-1·an-1 pour le bassin versant Renga avec un maximum de 3 t·ha-1·mois-1 atteint en avril et un minimum de 0,1 t·ha-1·mois-1 atteint en juillet. Pour le bassin versant de Mushuva, nous avons calculé un apport annuel en sédiments de 0,5 t·ha-1·an-1 avec un maximum de 0,08 t·ha-1·mois-1 atteint en décembre, un minimum de 0,02 t·ha-1·mois-1 atteint en juillet (Figure 8).
Figure 8. NDVI, érosivité ou facteur-R (MJ mm.ha-1.h-1.mois-1), débit (m3.s-1) et rendement de sédiments (t.ha-1.mois-1) à l’échelle mensuelle dans les bassins versants Mushuva et Renga. A correspond à la première saison pluvieuse (septembre à décembre), B correspond à la seconde saison pluvieuse (janvier à juin) et C correspond à la saison sèche (juillet à août) — NDVI, erosivity or R-factor (MJ mm.ha-1.h-1.month-1), flow rate (m3.s-1) and sediment production (t.ha-1.month-1) on a monthly scale in the Mushuva and Renga watersheds. A is the first rainy season (September to December), B is the second rainy season (January to June) and C is the dry season (July to August).
4. Discussion
4.1. Exportation des sédiments
47Au cours de l’année d’observation, la production annuelle de sédiments a été plus intense dans le bassin versant de Renga que dans celui de Mushuva. Cette différence substantielle est très probablement le résultat d’une couverture végétale plus faible et d’un terrain plus accidenté sur le site agricole et cela, malgré le fait que l’érosivité des précipitations dans le bassin versant forestier est plus élevée. Une recherche récente menée dans un bassin versant agricole montagneux, incluant le bassin versant étudié ici, sur la rive congolaise du lac Kivu a également montré que la couverture végétale réduite, combinée aux effets des pratiques agricoles et aux évènements de tempêtes intenses, entraîne une augmentation significative de l’exportation des sédiments vers les écosystèmes aquatiques en aval (Lizaga et al., 2025). Les résultats obtenus pour les deux bassins versants pendant la période d’observation ont été comparés à ceux existant pour les zones tropicales humides ayant des conditions topographiques et climatiques similaires (Tableau 2). Nos estimations pour une forêt tropicale de montagne (0,5 t·ha-1·an-1 à Mushuva) sont du même ordre mais supérieures à celles rapportées pour d’autres forêts du bassin du Congo (environ 0,25 t·ha-1·an-1, Baumgartner et al., 2022). Cela peut s’expliquer par la topographie plus abrupte de la forêt de montagne et par les précipitations plus élevées.
48La production de sédiments des bassins versants des régions tropicales humides (forêts naturelles, savanes et prairies) rapportée dans la littérature (Drake et al., 1999 ; Bagalwa et al., 2015 ; Tundu et al., 2018) varie entre 0 et 15 t·ha-1·an-1 (Tableau 2).
49La production annuelle la plus élevée de sédiments se situe dans le bassin versant Renga (> 10 t·ha-1·an-1 ; Figure 9). Les résultats se rapprochent de ceux de Kamaludin et al. (2013) dans la zone de Chalandise du bassin de la rivière Pahang en Malaisie ayant abouti à une production de sédiments allant de 0 à 13,79 t·ha-1·an-1. Ces valeurs plus élevées de production de sédiments dans le bassin versant Renga dépassent le seuil de tolérance d’apports de sédiments > 10 t·ha-1·an-1 signalé par Morgan (2009), Bamutaze (2015) et Karamage et al. (2016) pour les bassins versants de zones tropicales humides d’altitude.
Figure 9. Rendements annuels en sédiments (RS) des bassins versants en Afrique tropicale humide d’altitude — Annual sediment yields (RS) of high altitude tropical Africa watersheds.
Les cercles en couleur noire montrent les rendements annuels en sédiments compris entre 1 et plus de 10 t.ha-1.an-1. Les sites ayant le rendement en sédiments supérieur à 10 t.ha-1 sont considérés comme points chauds dans la région d’étude. Les cercles en couleur jaune représentent les rendements annuels en sédiments inférieurs à 1 t.ha-1.an-1 — Black circles show annual sediment yields between 1 and more than 10 t.ha-1.year-1. Sites with sediment yields above 10 t.ha-1 are considered hot spots in the study area. Yellow circles represent annual sediment yields of less than 1 t.ha-1.year-1.
50Ces valeurs élevées de production de sédiments dans le bassin versant Renga sont attribuées à l’application minimale de mesures de conservation des sols sur les collines aux pentes escarpées, à la déforestation accélérée mais également à la pluviosité (Senus et al., 2004). Cette large différence de la production de sédiments dans les deux bassins versants s’explique nettement par la topographie beaucoup plus accidentée dans le bassin versant Renga que dans celui de Mushuva, la gestion de la couverture/utilisation du sol (Sebahene et al., 1999 ; Keesstra, 2007 ; McVicar et al., 2007).
51L’Afrique en général a été largement sous-représentée dans les études précédentes visant à comprendre les facteurs contrôlant la production de sédiments à l’échelle régionale et continentale (Vanmaercke et al., 2014) mais également à l’échelle locale. Au moyen d’une vaste revue de la littérature sur les observations de production de sédiments en Afrique, cette lacune de recherche a été abordée (Vanmaercke et al., 2014). Par rapport aux autres continents, la disponibilité des données reste relativement faible. En plus, les observations dérivées des mesures de production de sédiments sont souvent basées sur de courtes périodes de mesures (< 5 ans) et soumises à des incertitudes importantes (Vanmaercke et al., 2014). Très peu d’études ont été réalisées dans les bassins versants des régions tropicales humides d’altitude sur les observations et la quantification de production de sédiments en suspension. Une grande partie des données existantes dans les régions précitées ont largement porté sur les pertes de sols par érosion hydrique en utilisant le modèle RUSLE (entre autres, Angima et al. [2003], Nyssen et al. [2004], Muhire et al. [2015], Karamage et al. [2016], Karamage et al. [2017], Chuma et al. [2021]).
52En tenant compte des différences d'érosivité dues aux précipitations, à la topographie, aux pentes et aux types de sol dans les deux bassins versants, une dégradation accélérée des sols est observée (Bagalwa et al., 2021). Les valeurs moyennes du facteur-C dans une zone agricole rapportées dans la littérature varie de 0,0001 à 0,003 pour les bassins versants forestiers ; de 0,003 à 0,02 sous une couverture herbacée dense en jachère et de 0,02 à 0,55 pour les terres arables exploitées pour la production agricole (Borelli et al., 2016 ; Karamage et al., 2016). La valeur du facteur-C obtenue ici pour le bassin versant forestier est inférieure à celle rapportée pour le bassin versant agricole. Le bassin versant forestier est ainsi plus végétalisé que le bassin versant agricole et comporte moins de sol nu. Le bassin versant agricole n’est couvert de végétation anthropique qu’en saison agricole humide. En saison sèche, le sol est nu et exposé à l’érosion. Les estimations de couverture du sol de ce travail de recherche corroborent celles rapportées par Borelli et al. (2018).
53Les données de télédétection sont aujourd’hui largement utilisées pour cartographier l’occupation et l’utilisation du sol et analyser la dynamique spatio-temporelle de la végétation (Reed et al., 1994 ; Ehrlich & Lambin, 1996 ; Lecerf, 2008). Nous avons constaté que les indices couramment utilisés tels que la NDVI (par exemple 0,8 à Mushuva et 0,6 à Renga) et le BSI (par exemple -0,26 à Mushuva et -0,17 à Renga) pour l’analyse de la dynamique de couverture végétale contiennent des informations permettant de décrire la variation mensuelle du facteur-C. Cette analyse démontre les difficultés associées à l’estimation des facteurs de gestion de la couverture du sol à partir des produits de télédétection dans des paysages complexes et inégaux où la taille des champs est petite car l’utilisation des sols et les types de couverture du sol sont notoirement hétérogènes.
54Pour expliquer les facteurs contrôlant l’exportation de sédiments dans les deux bassins versants, nous avons utilisé un modèle de régression linéaire (Tableau 3). Les résultats montrent qu’un modèle basé sur l’érosivité des précipitations et la gestion du couvert végétal peut expliquer environ 80 % de la variabilité observée dans l’exportation mensuelle de sédiments lorsque toutes les données de ces deux bassins versants sont groupées. De plus, ce modèle est également significatif lorsqu’il est appliqué séparément aux bassins versants, mais avec une performance limitée pour Mushuva (R2 = 0,34). Appliqué aux données groupées de deux bassins versants, l’analyse du modèle basé uniquement sur l’érosivité des précipitations indique que l’érosivité des précipitations est le principal facteur contrôlant le rythme saisonnier d’exportation de sédiments et qu’une quantification appropriée d’érosivité basée sur les modèles spatiaux est donc importante (Bagalwa et al., 2021).
55En revanche, les indices de végétation ont un pouvoir prédictif bien moindre. Nous soutenons que cela est lié au fait que nous utilisons une NDVI agrégée spatialement et qui ne capture pas complètement la structure spatiale du bassin versant, en particulier la connectivité entre les pentes et le chenal de la rivière.
4.2. Hystérésis des sédiments
56L’application d’une courbe d’évaluation des sédiments est suffisante pour estimer la dynamique des sédiments. Les boucles d’hystérésis des sédiments décrivent l’évolution de la relation CSS-Q au fil du temps et fournissent un outil pour isoler la réponse de CSS à la disponibilité des sédiments (Williams, 1989). Quand la CSS n’est contrainte que par la capacité de transport (Q) avec un apport illimité de sédiments, il n’y a pas d’effet d’hystérésis (Smith & Dragovich, 2009).
57Particulièrement, pour les bassins versants des rivières Mushuva et Renga, les exportations de matières en suspension sont principalement contrôlées par de forts évènements pluvieux, avec une contribution disproportionnée de quelques jours de pluie à l’exportation totale. Pour une meilleure compréhension des relations CSS-Q, nous avons analysé les modèles d’hystérésis (Figure 7). Cependant, l’analyse mensuelle d’hystérésis a montré des différences marquées entre les bassins versants. La plupart des évènements dans les deux bassins versants ont montré une hystérésis dans le sens horaire. Pour Renga, une hystérésis dans le sens horaire a été observée entre la CSS et le débit. Une hystérésis dans le sens horaire est le type de modèle d’hystérésis le plus courant dans les petits bassins versants torrentiels (Wood, 1977 ; Sidle & Campbell, 1985 ; Smith & Dragovich, 2009). Ce type de relation est généralement interprété comme une preuve de tarissement des sources de sédiments (Smith & Dragovich, 2009). À la fin de la saison sèche, des sédiments meubles sont disponibles, peuvent être plus facilement détachés et transportés par ruissellement au début de la saison humide. Au cours de la saison des pluies, les sols deviennent de plus en plus protégés par la végétation et la production des sédiments est limitée (Baumgartner et al., 2022). Cependant, cette limitation des sources n’est probablement pas la seule interprétation possible car une augmentation du débit pendant la saison des pluies, l’érosion des berges et l’apport de sédiments dans les zones proches des chenaux fluviaux sont également dans le sens horaire (Baumgartner et al., 2022). La relation CSS-Q a été, au contraire, très différente pour le bassin versant forestier. En particulier, dans le cas de Mushuva, le faible apport en sédiments ainsi que le point de rupture observé dans la relation CSS-Q (Figure 7) pourraient indiquer qu’il agit comme un système d’offre limité, avec un épuisement des sédiments au-dessus d’un débit de ~0,5 m3·s-1.
5. Conclusions
58La présente étude a fourni des informations sur la dynamique des sédiments exportés dans le bassin versant forestier et le bassin versant sous terres cultivées. Nous avons pu constater que l'apport en sédiments des deux bassins n'était pas similaire. L’apport en sédiments mesuré pour le bassin versant de Renga est parmi les plus élevés rapportés dans la littérature pour l’Afrique. Les fortes exportations de sédiments dans ce bassin versant sont liées à la faible couverture du sol, à la topographie accidentée et à la forte érosivité des précipitations. L’exportation de sédiments observée dans le bassin versant forestier en milieu montagnard était supérieure à celle signalée pour d’autres bassins versants boisés du bassin du Congo. Une analyse du facteur de gestion de la couverture végétale a montré que la conversion des forêts naturelles en terres agricoles peut accroître l'exportation des sédiments. Les résultats ont également indiqué que l’exportation de sédiments était principalement due à des orages, avec environ 50 % et 25 % de l’exportation annuelle dans le bassin versant agricole et le bassin versant forestier. L’analyse de l’hystérésis CSS-Q a permis de comprendre les processus sous-jacents concernant la dynamique de sédiments dans le bassin versant forestier et le bassin versant agricole. Même si les deux sites présentaient principalement une hystérésis dans le sens horaire, les processus sous-jacents étaient différents. Dans le bassin versant de Renga, en analysant les hystérésis dans la relation concentration de sédiments en suspension – débit, une tendance générale positive et une boucle dans le sens horaire étaient observées ; le débit élevé influençait la concentration de sédiments en suspension. Par contre, dans le bassin versant de Mushuva, la concentration de sédiments en suspension n'était pas dépendante du débit, les valeurs plus élevées de concentration de sédiments en suspension ne correspondaient pas à de débits élevés. Des mesures de conservation des sols à grande échelle (par exemple, le reboisement, la restauration de prairies, les terrasses, la construction de barrages de contrôle et l’éducation des agriculteurs) entraineraient une réduction significative de la charge sédimentaire dans les deux bassins versants.
59Déclaration de conflit d’intérêts
60Les auteurs n’ont déclaré aucun conflit d’intérêt potentiel en ce qui concerne la recherche, la paternité et/ou la parution de cet article.
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